Encore un lever à 5h. Qui est l’andouille qui s’est dit qu’un vol à 6h30 pour Salt Lake serait une bonne idée pour profiter un max de la journée ? Je m’habille vite, boucle la valise qui se ferme tout juste encore une fois, il faut dire que la tente Quechua rentre tout juste à l’intérieur. Mais là encore, 2,4kg, c’est imbattable. Le taxi me prend comme convenu à 5h20 direction l’aéroport. La fille du check-in me dit qu’elle est un peu trop lourde (ma valise), 53lbs au lieu des 52 autorisées. 500 grammes, même pas. Je peste intérieurement contre ces règles débiles, récupèrent les batteries d’appareil photo/ camera qui traînent, les fourre dans mes poches, ça devrait faire l’affaire. Je confie ensuite ma valise aux du TSA qui me demande de la laisser déverrouillée. Les gars si vous l’ouvrez vous n’allez pas être déçus. Pourvu qu’ils ne l’ouvrent pas. Histoire de gagner de la place dans la valise, je me trimballe dans l’aéroport avec un t-shirt, mon polo manche longue, un pull, plus ma veste goretex-polaire à la main. Ca me donne chaud rien que d’y repenser.
Le vol se déroule sans encombre entre Idaho Falls et Salt Lake, mais les paupières sont trop lourdes pour vraiment profiter du paysage. Arrivé à 7h30 à Salt Lake, il fait déjà chaud. Je récupère ma voiture, une belle Malibu bien équipée. Ca sera parfait pour la journée qui s’annonce, j’aurai besoin d’une bonne clim aujourd’hui. Le programme de la journée n’est qu’à moitié fixé. C’est une journée de transition entre le Wyoming et Seattle où je dois atterrir ce soir. Il y a un beau musée aéro juste au nord de Salt Lake, donc je vais forcément aller faire ce détour là, mais ensuite c’est chasse libre. Peut-être les reliefs environnants, peut-être le lac salé, peut-être la ville des Mormons et sa spécialité locale : la généalogie. Ou peut-être un peu de tout ça.
Je file vers Ogden où se situe Hill AFB et son musée. Après une semaine de parcs naturels, le retour à la civilisation et ses autoroutes surdimensionnées surprend un peu. J’y suis en moins d’une demi heure et le musée n’est pas encore ouvert. J’en profite pour faire les extérieurs pendant qu’il ne fait pas encore trop chaud. Je tombe le polo, tant pis pour les coups de soleils sur les bras. La collection extérieure est un peu laissée aux abus des conditions météo et des pigeons. Hill AFB a joué un rôle important dans le développement des missiles intercontinentaux et il y a des exemplaires de rampes mobiles US, de locomotives avec les cocardes USAF et pas mal de choses inhabituelles. Ogden était en fait un énorme arsenal (USAF/ Army / Navy) depuis la Seconde Guerre Mondiale et un gros centre de maintenance USAF. Plus qu’une base, c’est un énorme complexe militaire avec son réseau de train et une capacité à stocker appareils et munitions dans des conditions relativement favorables. Juste à l’ouest se trouve le site de Wendover qui est un des champs de tir les plus discrets et secrets des forces armées américaines.
La collection intérieure est en bien meilleur état. Le premier hangar couvre la période allant des Pionniers aux premiers jets, en couvrant évidemment amplement la Seconde Guerre, avec déjà pas mal de beau monde, dont un B-24 et un F-104A. Le 2e hall est encore plus impressionnant : on passe en revue tous les Century Fighter, les appareils et hélicoptères du Vietnam, et on fini par les chasseurs modernes, F-18, F-15, F-16, A-10.
Le clou du spectacle est l’unique Lockheed SR-71C Blackbird. Suite à la production des A-12 et des SR-71, le gouvernement avait fait détruire les outillages de la chaîne par mesure de sécurité. Mais un jour un SR-71B biplace de l’USAF s’écrasa et les militaires demandèrent à le remplacer. A défaut de pouvoir en construire un neuf, Lockheed identifia qu’elle pouvait récupérer l’avant d’un appareil qui avait servi aux essais sol, et récupérer l’arrière d’un YF-12 qui avait été partiellement détruit après un mauvais atterrissage. Voilà donc un Blackbird qui ne ressemble à aucun autre, surnommé The Bastard, identifiable en particulier à ses deux dérives inférieures sous les nacelles héritées de la configuration chasseur du YF-12. Malheureusement il n’est pas forcément bien mis en valeur et le hangar est assez sombre, bas de plafond, dur pour la photo.
Les musées ça endort et je me surprends à avoir la tête très lourde alors que je suis assis sur un banc devant une vidéo expliquant les subtilités du Blackbird. Je suis un peu dans les vap, je n’ai pas déjeuné. Je me secoue pour finir les photos et me décide à aller refaire le plein de sucre immédiatement après. La voiture, restée en plein soleil, est juste brûlante et affiche 104°F de température extérieure, soit 40°C. La vague de chaleur annoncée est bien arrivée, dans la Vallée de la Mort on s’approchera du record historique ce jour là. Moi ça fini de m’achever. Je trouve un McDo pas loin mais le burger me dégoûte presque. J’abdique, je laisse le moteur tourner pour la clim et pique une petite sieste pour récupérer. Robin, il va falloir que tu t’occupes un peu plus sérieusement de ton sommeil si tu veux tenir trois semaines…
Les batteries rechargées, je prends ensuite la route avec la GoPro direction la montagne qui surplombe la base, Ogden Canyon. La route montante est pourrie par les travaux, mais arrivé sur le plateau on trouve un beau lac qui sert de base nautique aux gens de la région. Je tourne vers le Sud pour redescendre vers le lac salé par une autre route. Alors que je m’apprête à tourner, je laisse la priorité à deux magnifiques Harley, une pour Monsieur, une pour Madame. Ca tombe bien j’ai la GoPro sur le capot et je les suis sur ce magnifique ruban qui enchaînent les différents reliefs comme un toboggan de parc aquatique. Ca me remet de bonne humeur. Je suis revenu sur Ogden, mais au sud désormais. Devant moi le lac salé et une île au milieu, qui fait office de parc naturel. Je pousse donc jusqu’à Antelope Island. Je fais tout à la GoPro parce que sortir de la voiture pour faire une photo est un supplice.
La route d’accès est en fait une digue qui traverse le grand lac salé. Pas de vent aujourd’hui, le lac est un miroir. C’est bleu partout au-dessus et c’est bleu partout autour. Le résultat au volant est assez irréel, on a vraiment l’impression de conduire au milieu de nulle part. J’ai envie de faire des photos mais le thermomètre m’en dissuade. Sur l’île on trouve une végétation qui s’apparente à la salicorne de Camargue. Des troupeaux de bisons ont élu domicile ici. L’île est en fait une belle petite colline qui donne de beaux points de vue sur le lac. A l’Est Ogden et ses reliefs, au Sud Salt Lake et l’aéroport. A l’Ouest, sans les voir réellement j’imagine volontiers les célèbres étendues blanches de sel de Bonneville Flats, où ont été battu tous les records de vitesse pour véhicule terrestre.
16h, il est temps de prendre gentiment la direction de l’aéroport. Je fais un passage par le centre ville de Salt Lake, avec l’église des Saints des Derniers Jours. L’église n’est pas très grande, mais les buildings flanqués du même nom tout autour sont beaucoup plus imposants. La généalogie a l’air d’être un bon business. Un peu plus haut, on trouve le State Capitole, version 1/3 de celui de Washington. Là encore je reste sagement dans le confort de l’air conditionné et limite les photos au minimum. Il fait toujours aussi chaud, je colle dans mes fringues et la journée est loin d’être terminée.
Je rends la voiture à l’aéroport, j’ai pas mal d’avance en prévision des checks TSA qui avaient l’air assez lents le matin même. Sauf que l’aéroport est vide à cette heure et je passe tout ça en 5 min. J’en profite pour écrire deux cartes, checker mes mails, manger un morceau et il est temps d’embarquer direction Seattle Tacoma. On décolle avant le coucher du soleil et tout le long on fait la course avec lui. J’essaye de reconnaître les paysages survolés en vain. Tout est très pelé là-dessous. J’espère voir le Mt Rainier à l’arrivée et me tords le cou comme d’habitude pour le voir à travers le hublot. Je constate sur l’écran de l’iPhone de la personne sur le hublot opposé que visiblement le Mt Rainier est plutôt de son côté… Le tour de piste pour s’aligner face au Sud permet de voir un peu de paysage avec les derniers rayons du soleil et on pose. Je récupère ma valise rapidement, prend le bus qui vous amène beaucoup plus loin dans un gigantesque parking à étage dédié aux loueurs de voitures. Chose marrante, ici on ne vous attribue pas une voiture, on vous dit de choisir parmi une rangée du parking. Le rêve ? L’horreur oui ! Je passe une demi-heure à peser les pour et les contres de chacune. Je jette mon dévolu sur une Hyundai qui m’a l’air de faire l’affaire, même si en guise de roue de secours, j’ai un manuel pour la bombe de gonflage secours. Bon normalement on ne devrait pas sortir du bitume. Normalement.
Je trouve mon motel sans difficulté et bricole encore quelques trucs sur le PC avant de me coucher raide mort avant 22h. Là faut vraiment que j’arrête les conneries et que je dorme. Une chance, normalement demain sera une des étapes avec le moins de miles au compteur. Normalement.
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